Les ateliers de la Citadelle se sont tenus à Lille en présence d'un auditoire nombreux et d'intervenants forts intéressants.
La tenue de ce colloque suit de quelques semaines la publication d’un rapport parlementaire qui dressait un bilan sans concession sur l’Europe de la défense.
Cette année deux thèmes avaient été choisis par les organisateurs des ateliers.
1. Les coopérations militaires, le champ du possible
2. Les coopérations et les mutualisations opérationnelles, capacitaires et industrielles
Quelques idées importantes du débat et du rapport parlementaire
L'Europe de la défense
La PESD a connu une période faste de 2000 à 2008. A cette époque les structures n’étaient pas réellement en place mais il y avait une volonté. Actuellement les structures sont en place mais plus rien de concret ne se passe.
L'Europe de la défense est un concept purement français qui n’est pas repris par la majorité des partenaires européens. Il s'agit malgré plus d'une incantation qu'une réelle volonté de collaborer. La volonté politique étant quelquefois facilement difficilement transposable en termes militaires.
Trois facteurs auront une influence importante sur le futur de la PSDC :
· L’avenir de l’OTAN ;
· Le balancement des USA vers le Pacifique ;
· La crise économique et financière.
Les ambitions de l’Europe de la défense ont souvent été limitées par des conceptions divergentes de la place de l’Europe dans le monde. La France est en effet le seul pays d’Europe à avoir encore des territoires dans tous les océans de la planète, sauf l’Arctique.
Un des participants a justement proposé trois axes qui pourraient constituer une ébauche de définition d’intérêts stratégiques.
-Sécurité du voisinage au sen large (Sahel, Corne de l’Afrique, Golfe Arabo-persique)
-Sécurité maritime dans ces zones et celles adjacentes
-Contribution au système de sécurité collective de l’ONU
Le bilan récent de la PSDC est plutôt négatif :
• Échec grave de l’EUFOR Libye, qui n'a pas obtenue le feu vert des Nations Unies et n’a en réalité jamais été déployée dans le pays.
• L’opération Serval est le type même d’opération que l’Union européenne ambitionne de pouvoir mener collectivement dan le cadre de la PSDC et une fois de plus, comme dans le précédent de la Libye, elle s’est avérée incapable de le faire.
• La solidarité européenne ne s’est pas exprimée dans des conditions satisfaisantes pour la mission de formation EUTM Mali.
il y a un manque de clarté dans le « maquis » des organismes traitant des questions de sécurité au sens large a multiplication des instances compétentes ou parties prenantes qui, dans le cas de la Libye, a débouché sur une véritable paralysie de l’action de l’Union européenne. Forces est de constater que le centre des opérations n’a pas les capacités suffisantes.
Dans la conjoncture actuelle de crise budgétaire, aucun État ne semble disposé augmenter ou même maintenir sa participation aux opérations, qui restent en grande partie à la charge du budget national, le mécanisme de financement ATHÉNA ne permettant de communautariser qu’une faible partie du budget de l’opération (le commandement et certaines tâches communes).
Un constat
La haute représentante a peu fait progresser la PSDC pour de multiples raisons (manque de charisme, de volonté des états, nationalité)
L’application du traité de Lisbonne et la coopération structurée permanente n’en est qu’à ses débuts mais pourrait faire progresser la situation dans un contexte économique très défavorable. La CSP est un réservoir de capacités nationales, mises à disposition par les États membres. Ces derniers conservent leur souveraineté sur ces capacités nationales : s’ils souhaitent qu’elles ne soient pas mises à disposition pour telle ou telle mission, elles ne doivent pas l’être. Mais sauf opposition étatique, l’Union européenne doit pouvoir puiser dans ce réservoir de capacités, pour les utiliser de façon flexible, en fonction des besoins de telle ou telle mission.
La procédure est considérablement assouplie par rapport aux autres coopérations renforcées puisqu’elle n’est pas soumise à un nombre minimal de participants. Selon les rapporteurs, la mise en place de la CSP ne dépend pas, en tout état de cause, d’obstacles financiers, mais bien d’une volonté politique. Certains États ont d’ailleurs manifesté clairement leur intérêt pour la CSP (notamment la Belgique, la Hongrie, la Pologne). L'Europe a donc entre les mains l’instrument de relance de sa politique de défense. Elle peut décider de l’utiliser à tout moment. Le voudra telle ?
Ce traité introduit aussi une innovation fondamentale qui concerne la « clause de défense mutuelle »
Il n'existe aucune force réellement européenne
Peu de pays même la France sont réellement disposés à fournit des forces en permanence au profit d'une organisation internationale (OTAN,UE). Il n'y a actuellement qu'un seul BG disponible au lieu de deux prévus. Ceux-ci comme la NRF de l'OTAN constituent un excellent cadre pour un entraînement, servant à augmenter l’interopérabilité des troupes et à créer de la solidarité entre nationalités. les groupements tactiques de l’Union européenne n’ont jamais été déployés en opérations : ils sont restés un instrument virtuel. En exagérant un peu ; ce sont des forces de « non emploi »
Les forces multinationales ne sont pas européennes (EUROCORPS,BFA). Elles restent sous commandement national et sont le fruit d'initiatives bi ou multilatérales. Elles sont régulièrement déployées sous commandement national (Afghanistan, BFA en Côte d'ivoire). La dissolution de l'EUROFOR (Florence) montre que si il y a des doublons un effort de rationalisation peut être effectué au regard des capacités de l'OTAN.
L’initiative franco-britannique sert’ elle la défense européenne ?
Oui ; indirectement.
Dans ce domaine, il est nécessaire de prolonger l’impulsion politique par des discussions approfondies sur nos intérêts stratégiques. Pour donner corps à cette vision, le projet de force commune franco Britannique CJEF (Combined Joint Expeditionnary Force) apparaît comme une démarche pertinente. Le rapprochement opérationnel reste une étape. La création à l’étude d’un groupe aéronaval franco-britannique (GAN) à l’horizon 2020 – comportant un porte-avions et son groupe aérien fourni par une des deux nations, l’état major et l’escorte étant communs – permettrait de donner un signal fort à nos partenaires européens
Ce qui fonctionne.
Les petites opérations, les concepts qui offrent aux états de la souplesse leur permettant de récupérer leurs moyens sur court préavis.
• Les coopérations souples, comme le montre, dans le domaine de la coopération aérienne, l’exemple de l’EATC (European Air Transport Command).
• L’opération ATALANTA est un succès et contribue incontestablement à l’amélioration de la lutte contre la piraterie.
• EUFOR SOMALIA : 6000 soldats ont déjà été formés et un lien direct existe entre cette formation de l’armée somalienne et la stabilisation de la Somalie.
On constate que des accords régionaux » qui associent en général des puissances moyennes sont en général un succès.. On peut citer l’étroite collaboration entre les marines hollandaises et belges ; l’intégration récente d’une brigade néerlandaise au sein d’une division allemande.
Les coopérations et les mutualisations opérationnelles, capacitaires et industrielles
On ne peut que constater la difficulté des états à planifier et acquérir des capacités en commun. Il y a quelques succès en commun dans des domaines qui ne sont pas spectaculaires ou visibles. L'approche intergouvernementale a tendance à brider les initiatives.
Il faut constater que beaucoup de pays sont dans des phases de réception de matériels. S'il n'y a pas de projets futurs de grande ampleur les équipes de recherche et développement vont s’éparpiller dans d’autres pays.
Le mariage manqué EADS-BAE laissera des traces importantes dans le paysage industriel européen Cela pourrait se traduire par un éventuel changement de stratégie du groupe et le ratio activité militaire et civile. L’Allemagne n'est pas sensible à l'idée de la base industrielle et technologique de défense.
L’industrie a été échaudée par les drones (Talarion, euromale) et l’A400. L’industrie de la défense est régie par la demande et ne peut se comparer à un autre secteur économique.
Au niveau eropéen, des choses positives avancent dans les domaines d’environnement et le soutien des forces. Malgré un budget restreint, l’Agence Européenne de Défense (AED) agit à la carte à partir de deux états. Elle interviendra bientôt dans le domaine très complexe de la certification des aéronefs militaires.
Les trois priorités de l’agence
· Le ravitaillement en vol;
· Les drones ;
· La cyber-défense .
En conclusion
Selon le rapport de l'assemblée nationale, l’année 2013 semble être l’année de tous les défis pour l’Europe de la défense.
Tous les intervenants des ateliers de la citadelle sont aussi d'accord pour dire qu'il s’agit de ne pas laisser passer cette fenêtre d'opportunité que représente la mise à l'agenda du Conseil européen des "questions de défense . Ceux-ci sont des enjeux majeurs pour les intérêts stratégiques et économiques de l'Union européenne.